Edito de la Lettre d'information de l'ERENA Bordeaux - Juillet Août 2020.
" La pandémie du Covid-19 a bouleversé nos vies et l’importance de la valeur immédiate des choses. Cependant, dans la mesure où la menace est en partie maitrisée, l’activité citoyenne, sociale et politique reprend son cours. Il en va aussi des polémiques suscitées par les modifications des lois bioéthiques actuellement en second lecture à l’Assemblée Nationale.
Outre la mesure phare de l’extension de la PMA aux femmes seules et aux couples de femmes, un nouvel amendement a été discrètement voté. Il s’agit du recours pour les couples lesbiens à la méthode dite « réception d’ovocyte de la partenaire » (ROPA).
Elle consiste à implanter l’ovocyte d’une femme d’un couple lesbien, fécondé par du sperme d’un donneur anonyme, dans l’utérus de l’autre femme du couple. Les couples lesbiens font prévaloir que la ROPA permettrait une expérience partagée de la maternité, l’une comme génitrice, l’autre comme gestatrice.
Un tel amendement avait été rejeté par le gouvernement en première lecture. Mais le rapporteur de la commission spéciale l’a proposé et fait voter lors de la récente seconde lecture où aucun membre du
gouvernement n’était présent.
Au moins deux arguments sont avancés par les opposants à cette pratique. Un premier concerne le fait que ce « don dirigé » rompt le principe du strict anonymat entre donneur et receveur. En effet, l’anonymat, avec la gratuité et le consentement, fait partie des piliers des lois françaises de bioéthiques. Certains opposants mettent en exergue un second argument, pour eux la ROPA est une «forme déguisée» de gestation pour autrui (GPA)… On sait que la GPA n’est volontairement pas évoquée dans la présente loi. Il est donc peu probable que, lors du vote définitif, la ROPA soit introduite dans le nouveau corpus législatif.
Cependant, l’évolution émancipatrice de la société - qu’il s’agisse du concept habituel de la famille ou, et surtout, de fondements comme l’égalité et la liberté fera que la ROPA pour les couples lesbiens et la GPA pour les couples homosexuels d’hommes resurgiront dans le débat éthique et politique. "
Sincères salutations,
Pr Bernard Bioulac
Directeur adjoint de l’ERENA – Directeur du site de Bordeaux
Professeur émérite à l’Université de Bordeaux, Membre de l’Académie Nationale de Médecine